C’est par cette tirade que, dans sa pièce dramatique, Alphonse de Lamartine peint les combats du « spartacus noir ». Le poète-député qui s’apprête alors à voter la seconde abolition de l’esclavage, en même temps qu’il vit l’histoire, fixe la légende.
Dans une Révolution qui, jusqu’au gouvernement révolutionnaire, a souvent silencié la question coloniale, c’est du côté d’ #Haïti que sourd la revendication d’une égale dignité humaine. La révolte qui naît dans ce pays de Saint-Domingue aux cinq cent mille esclaves se dote d’un chef, Toussaint Louverture.
Libérateur d’esclaves ? Politicien cynique et avide de pouvoir ? C’est en raison de l’ambivalence du personnage que se tiendra son procès posthume, celui qu’on lui refusa et qui sera présenté par la FFD – Fédération Francophone de Débat, le 5 octobre prochain, dans le cadre des Rencontres internationales d’éloquence et de débat francophone. Cette instance exceptionnelle sera l’occasion de proposer au public l’examen d’un cas qui ne cesse de faire alterner l’ombre et la lumière.
La lumière ? Celle qui éclaira le monde d’un jour nouveau, portée par un affranchi né dans les fers. L’ombre ? Celle d’un homme qui tarda à soutenir les révoltes d’esclaves, en posséda même, attendant pour se rebeller de se voir refuser l’égalité des droits entre Blancs et hommes libres de couleur.
La lumière ? Ce chef qui unifia l’armée de Saint-Domingue pour arracher l’indépendance d’Haïti qu’il ne verra que depuis sa tombe. L’ombre ? Cet habile manœuvrier qui noua et dénoua les alliances pour parvenir à ses fins, laissa dans leur condition miséreuse les anciens esclaves et promulgua une constitution faite pour lui octroyer tous les pouvoirs.
La lumière ? Cet homme qui combattit vaillamment l’armée française de Bonaparte voulant rétablir l’esclavage. L’ombre ? Cet homme qui capitula, fut déporté et mourut seul dans sa cellule, humilié par ses geôliers et sans jamais avoir pu se défendre.
Il s’agit maintenant de retrouver l’homme dans ce clair-obscur, cet homme peut-être aussi grand que son ombre, celui qui accomplit ce qu’Aimé Césaire qualifia de « piteuse merveille […] lancer un mouvement révolutionnaire à contresens de l’histoire. »